Vie à deux vitesses

Vie à deux vitesses

Lundi, petit matin, encore une nuit écourtée
Réveillé trop tôt, attendre, et le silence écouter
Vais-je parvenir à me rendormir, je commence fortement à douter
Puis soudain, elle arrive, celle que ma quiétude ne cesse de redouter

Elle, c’est cette boule qui s’installe subitement dans ma poitrine
Celle qui s’impose, lorsqu’une émotion me submerge et me domine
Ce matin, c’est le futur départ de mes enfants qui me chagrine
Ce matin, c’est la rentrée, ils prendront le bus, et je ne les verrai plus pendant une semaine, c’est malheureusement devenu notre routine

On ne peut pas dire que nous soyons malheureux, il y’a bien pire comme situation
Mais c’est tellement difficile parfois, de faire des adieux à répétition
Une semaine sur deux dans le vide, comme une éternelle punition
À peine le temps de retrouver nos habitudes, que c’est déjà l’heure de la transition

Ce soir, mes deux amours retourneront chez leur mère
Tout à l’heure, je les regarderai partir, avec un goût amer
J’ai l’impression que dans mon rôle de père, je ne suis plus qu’intérimaire
Leurs passages me semblent beaucoup trop éphémères

Pourtant, ce week-end, ils étaient tout près de moi, ils se sont amusés
Mais la culpabilité de ne pas avoir assez profité d’eux est revenue, après avoir infusé
Je sais pourtant que je fais de mon mieux, que je n’ai pas abusé
J’ai juste entretenu la maison, je n’ai pas à m’en vouloir, ni à m’excuser

Encore une semaine sans eux, sans pouvoir les toucher ni les voir
Bien sûr, moins d’agitation, ça fera beaucoup moins la foire
Je n’aurais pas à m’occuper d’eux, ni de leurs devoirs
Je n’aurais pas non plus à râler de les voir grimper sur les murs du couloir

Leur chambre sera vide, personne n’y dormira ce soir
Les livres continueront à prendre la poussière, je ne leur lirai pas d’histoire
Je ne pourrais pas jeter un œil par la porte avant de me coucher, pour les regarder dormir comme des loirs
Mais je sais qu’ils vont bien dans leur « autre » vie, alors, pas question de broyer du noir

Ce n’est pas agréable d’appréhender le retour de ces propres enfants, c’est terriblement culpabilisant
Quand ils reviennent, ils faut systématiquement que nous nous réadaptions, le changement de rythme est pour tous déstabilisant
Ne pas les avoir à temps plein pour les éduquer à ma façon, je trouve ça parfois démoralisant
J’ai souvent l’impression de ne pas pouvoir lutter contre tout ce qui me déplaît, mais j’essaie autant que possible, en les sensibilisant

Je sais qu’une fois ma journée de travail entamée, je me sentirai mieux
Je me consolerai, en imaginant leur sourire malicieux
Je me remémorerai les moments les plus délicieux
Je relativiserai, en mesurant ma chance d’avoir ces deux garçons, pour moi tellement précieux

Le destin a choisi de m’enlever mes enfants pour la moitié de ma vie
J’ai dû céder, il ne m’a pas demandé mon avis
Ça c’est passé tellement vite, un changement radical de vie, presque sans préavis
Mais je suis fier de voir ce que nous avons surmonté, de montrer la montagne que nous avons gravi

À tout les parents qui peuvent serrer leurs enfants tout les jours
Savourez votre chance, elle ne durera pas toujours
Et si vous pensez déjà rupture, pensez aux conséquences, à vos petits,réfléchissez, faites bien le tour
Quoi qu’on en dise, ça restera une déchirure pour les enfants, un traumatisme sans issue de secours

Quand à ceux pour qui c’est trop tard, qui ont choisi ou subi la séparation
Mettez vous à la place de vos enfants, ne les utilisez pas comme des armes pour venger votre frustration
Si vous tenez à eux, pensez à leur équilibre, et si avec l’autre parent vous n’avez pas une bonne communication
Ne le critiquez pas, ne le salissez pas, laissez les enfants grandir, ils analyseront et jugeront par eux-mêmes, ne laissez pas votre ego saccager leur construction

Loïc Otharan
07 Novembre 2022

Commentaires associés à cette publication

2 réponses à Vie à deux vitesses

  1. Aizpuru dit :

    ❤️❤️❤️