Souviens toi
Perché là haut, au sommet de la montagne
Dominant les villes alentours et les campagnes
Tu es fier de toi, car à chaque fois tu gagnes
Tu méprises ceux qui tout en bas restent au bagne
Tu fêtes ta réussite en buvant du champagne
La vanité est devenue ta principale compagne
Dans un nuage ton humilité s’éloigne
Tu n’apprécies que ceux qui t’accompagnent
Ton air arrogant en témoigne
Là-haut sur ton siège si confortable
Tout comme tes copains qui se sentent indispensables
Tu fixes l’horizon, imperturbable
Tu as l’impression d’être invulnérable
Certains sont arrivés là de façon discutable
Ils n’ont pas tous eu peur des dessous de table
Quelques uns traînent des casseroles inavouables
Mais tu as l’avantage d’être irréprochable
Car tu as réussi de façon admirable
Ça ne fait pas pour autant de toi quelqu’un de bien
Car tu méprises ceux qui en bas n’ont rien
Les considères comme des simples vauriens
Tu n’aimes pas ceux qui font parti du peuple moyen
Ne respecte pas non plus les anciens
La misère au loin et le luxe au quotidien
Tu n’acceptes d’avoir en mitoyen
Que des possesseurs de richesses les doyens
Et pourtant, tu n’es rien de plus qu’un simple citoyen
Si tu es placé là , ce n’est pas par erreur
Tu as travaillé dur, c’est tout à ton honneur
Ta jeunesse associée à des années de dur labeur
Pendant longtemps il y’a eu sur ton front de la sueur
On ne peut pas t’accuser d’avoir été un gros dormeur
Pendant que tu bossais, certains jouaient aux branleurs
Tu as sacrifié ta vie, divorcé bien avant l’heure
L’argent est ton bon dieu, en manquer est ton pire malheur
Mais as-tu réussi à trouver le vrai bonheur ?
Toi qui enfant était un coquin, un farceur
Avec tes camarades vous aimiez chanter en chœur
Tous t’enviaient tes talents de dessinateur
Il y’a longtemps que tu as perdu ton côté rêveur
L’appât du gain t’a fait devenir bosseur
Dans ton milieu tu es devenu l’empereur
Tu jubiles lorsqu’on vient te demander une faveur
Les gens qui comptent pour toi sont tous des directeurs
Des gros bonnets, politiciens ou encore monseigneurs
Je t’en prie, arrête avec tes airs supérieurs
Approche toi du ravin
et prend donc tes jumelles
Regarde tout en bas cette ambiance fraternelle
Les gens que tu distingues ont tous le même ciel
Beaucoup se donnent mais n’ont pas eu ta chance providentielle
Ils sont en bas mais plus haut que toi sur le plan spirituel
Chez vous là-haut, l’amitié est toujours au conditionnel
Votre bonheur est tout simplement artificiel
En bas ils ont compris, l’amour et la santé, c’est l’essentiel
Toi qui est maintenant un marchand d’heures
Qui met à genoux tout les marchandeurs
Ton âme d’enfant s’est vu enfouie en profondeur
Mais si tu remplaces ton costard par un débardeur
Que tu creuses assez longtemps avec ardeur
Une fois retirées la crasse et la laideur
Tu retrouveras enfin la tiédeur
De ta joie de vivre, sa bonne odeur
Du bien-être commun tu voudras être l’ambassadeur
Si les gens d’en haut te paraissent si minuscules
Souviens toi qu’avant d’aller côtoyer les crapules
Tu admirais les sommets du matin au crépuscule
Face à leur grandeur tu te sentais ridicule
Tu rêvais d’aller là-haut pour faire le funambule
Tu devrais comprendre avec le recul
Que malgré ton statut tu n’es qu’une particule
Que sans ceux d’en bas ton monde aussi bascule
Que s’ils veulent d’en bas ton sommet ils le brûlent
Beaucoup envient ta place d’or
Mais moins sont prêts à faire tes efforts
Ignore celui qui te jalouse et dort
Montre à ceux qui le méritent que tu sais être bon et fort
La maladie, le grand âge en ont fait redescendre du sémaphore
Comme eux tu pourrais aussi un jour avoir besoin de renfort
Alors aide ceux qui essayent à sortir de leur amphore
L’union s’est connu de tous ça rend fort
Dominer, mépriser, c’est tellement facile
Fédérer, aimer, ce n’est finalement pas si difficile
Écraser les autres en les voulant dociles
C’est rendre son avenir plus fragile
Encourager les faibles de façon subtile
Les faire grandir sans regarder son nombril
C’est savoir se rendre utile
Tout en ressentant la joie qui se faufile
Loïc Otharan
10 Novembre 2021
