Quand je veux

Moi, arrêter ? C’est quand je veux !
Je ne prend ces choses que lorsque je me sens mal, ou un peu trop nerveux
Ce n’est pas parce que tu m’as surpris à maintes reprises avec cet air baveux
Que tu dois me traiter comme un petit morveux
Que l’on punirait pour ces bêtises, en lui tirant les cheveux
Ce n’est pas parce que tu m’as grillé, que tu m’as obligé à faire des aveux
Que tu dois t’inquiéter, pour sauver ma santé, faire des vœux
Je te le dis, je te le répète, cette chose, je peux m’en passer, j’arrête quand je veux !

Tu es bien sûr de toi mon cher, mais permet moi de douter
Cette chose, que tu ingères pour te soulager, a la capacité de t’envoûter
Elle a aussi la capacité de fortement me dégoûter
Car si tu maintiens pouvoir t’en passer, j’ai pu voir qu’en fait, tu as plutôt tendance à la chouchouter
Et si lorsqu’on absorbe cette chose, ça ne s’appelle pas se shooter
Les dégâts causés sont aussi importants, et très cher ça pourrait te coûter
Sous l’emprise de cette chose, tes perceptions sont floutées
Plus tu en ingères, plus ton corps semble voûté
Avant de comprendre, j’ai plus d’une fois été dérouté
Puis j’ai découvert que pour cette chose, tu étais capable de filouter
La prendre en public, en la faisant passer pour un petit velouté
J’ai pris le temps d’essayer de te comprendre, de t’écouter
J’ai longtemps fait semblant de ne rien voir, pour ne pas en rajouter
Vraiment, je t’assure, les moments où tu prends tout ça , je ne peux plus m’empêcher de les redouter

N’importe quoi ! Je te dis que ce n’est pas une addiction !
Tu ne retiens que le mal, de ces moments tu en fais des additions
Mais je ne suis pas ça, de moi tu fausses la définition
Je me sens parfois mal, mais je suis loin d’être en perdition
Je prend ça juste lorsque les mauvais moments sont en superposition
Avant que les nerfs ne me lâchent, lorsque je suis en ébullition
C’est vrai que parfois, je déraille, je m’impose la malnutrition
Mais de là à dire que j’ai l’air d’une chouette en décomposition !

Je voudrais bien te croire, sans faire d’opposition
Je voudrais bien fermer les yeux, condamner mon audition
Mais le problème, c’est que je marche à l’intuition
Cette intuition m’oblige à voir, à regarder, comme pour m’infliger une punition
Je préférerais, pour ne pas avoir à me mêler de tes affaires, atténuer certaines de mes perceptions
Tu vois mes remarques comme du chantage, comme si j’imposais mes conditions
Tu prends mes reproches comme si, contre toi, je préparais une pétition
Mais tu n’as toujours pas compris qu’à ton bonheur, je ne suis pas là pour faire opposition
Tu n’as pas compris que de la musique de ta vie, je ne souhaite pas réécrire la partition
En te montrant l’évidence, je suis juste en train de te faire une proposition
Celle de t’en sortir, de réussir en ayant de l’ambition

Ce n’est pas si grave que ça, tu exagères
Sur toute une bibliothèque, tu ne regardes qu’une seule étagère
Je ne suis pas ce que tu décris, tu me parles d’une personne étrangère
J’ai mes souffrances, c’est vrai, et comme je peux je les gère
Il m’arrive en effet d’avoir des humeurs passagères
Aussi malodorantes que des ordures ménagères
Je les hais, je les déteste, ces maudites mégères
Je n’ai rien trouvé de mieux, afin que mon intérieur les digère
Que d’ingérer cette chose, qui l’illusion du bien-être me suggère
Elle devient alors ma principale messagère
Mais je reconnais que les informations qu’elle m’envoie sont quelque peu mensongères
Tu vois, je reconnais mes défauts, alors ne dis pas que je prend les choses à la légère

Je ne suis pas tout à fait d’accord, pourtant j’aimerais mieux te dire le contraire
Ce que je vais te dire ne va certainement pas te plaire
Tant pis, je n’ai absolument pas le droit de me taire
Car si je ne te le dis pas, qui va le faire
Tu es dans le déni, et tout seul, de cette chose, tu ne pourras t’en défaire
Je sais que pour en arriver là, tu as traversé les enfers
Que tu as vécu des situations à cause desquelles ton cœur a beaucoup souffert
Je sais que tu ne parles pas, et te sens seul comme dans le désert
Mais ce n’est pas en te réfugiant dans cette malsaine atmosphère
Que tu te sortiras de cette satanée galère

Comme tout ce qui peut devenir addiction, cette chose te fait miroiter la délivrance
Mais regarde bien l’ensemble, et analyse à ta convenance
Consommer cette chose en groupe, en cherchant la bonne ambiance
Ce n’est pas si mal, j’en conviens avec aisance
Mais le faire seul, caché, pour atténuer tes souffrances
Je considère ça comme une recherche d’assistance
Et si tu faisais preuve de plus de clairvoyance
Tu verrais que revenir si régulièrement vers cette substance
C’est considéré comme une véritable dépendance

Si autour de toi, personne ne voit, ou s’ils préfèrent faire preuve de condescendance
Ils risquent de bientôt devoir faire à tes proches leurs condoléances
Car dans ces moments où tu fuis loin de ta conscience
Où ta logique disparaît, où tu es plein d’incohérences
Où malgré toi, tu apportes des nuisances
Sur ce qui est matériel, par ton manque de prudence
De nombreux dangers rôdent, par ton manque de vigilance
Ton sentiment initial de puissance
Te fais consommer cette chose à outrance
Mais ne compte pas toujours sur ta généreuse chance
Pour te protéger des nombreuses éventuelles sentences

A mon âge, j’ai suffisamment d’expérience
Pour déceler certaines fausses apparences
J’ai à plusieurs reprises eu l’occasion de croiser des personnes qui m’ont fait des confidences
J’ai plusieurs fois, dans mon entourage, constaté quelques déviances
Ayant moi-même déjà cherché de nombreux moyens pour fuir la violence
D’émotions trop intenses,
vécues durant ma petite existence
Je sais que nous avons tous facilement tendance
A vouloir contourner notre mal-être en toutes circonstances
Pour cela nous sommes prêts à faire preuve de désobéissance
Tout en nous murant dans un profond silence
Nous craignons d’accepter les rares mains tendues, nous n’avons pas confiance
Nous privilégions ce qui soulage dans l’urgence
Peu importe si ça peut nous envoyer dans le monde de la décadence

Au final, qu’est-ce qui est le plus important ?
Sa fierté , son ego , ou bien se faire aider, pour repartir gagnant, la victoire en la remportant ?
Ne vaut-il mieux pas choisir d’aller vers ceux qui nous sourient en nous portant ?
En leur avouant nos faiblesses, en leur rapportant
Nos sentiments, notre grand besoin de réconfortants
Il n’y a pas de honte à avouer que nous passons parfois la vie juste en la supportant
Les problèmes ne se traitent pas en les niants, ni en les reportant
Ils ne se traitent pas non plus en les exportant
Mais en commençant par les identifier, les reconnaître, et se tourner vers les bonnes personnes en les apportant

Marcher seul dans la nuit, c’est gâcher sa lumière
Se réfugier dans l’oubli, c’est finir en poussière
Dans toute forêt noire, il y’a une lisière
Les nuits les plus lugubres ont toutes une frontière
Toujours aller de l’avant, pour les laisser derrière
Accepter d’embarquer, pour vivre la croisière
De la reconstruction, du renouveau, de tout ce qui rend fier
Le soleil qui se lève tel une montgolfière
Majestueux et digne, nous montre à sa manière
Que briller en montant, sans faire machine arrière
Vaut mieux que d’attendre, coincé par la barrière
Noirci par le passé, en ne pensant qu’à hier

Loïc Otharan
03 Février 2022