Les trois cœurs ❤️‍🩹❤️🩷

Les trois cœurs

La vie battait son plein, tout en bas, dans les plaines
Là-haut, dans les montagnes, l’ambiance était plus zen
Les sommets à travers les nuages, que l’on distinguait à peine
Surplombaient la folie des hommes, loin des scènes malsaines

L’actualité morose, ne datant pas d’hier
Les gens qui s’agitaient, comme dans une fourmilière
La guerre qui s’approchait, ne les rendant pas fier
Certains pour oublier, montaient vers les bruyères

Une légende disait que dans les plus hautes forêts
Vivait un troll horrible, qui les gens dévorait
Il existait vraiment, la plupart l’ignoraient
Il n’était pas méchant, un jour, ils le sauraient

Comme tout les jours, blotti sous son rocher, juste à côté d’un hêtre
Ce troll médite, cherchant sa raison d’être
Laissant le jour passer, et la lune apparaître
Pour aller chasser la haine, la faire disparaître

Le monde tourne mal, la journée fut mouvementée
Le troll fatigué, par les horreurs, épouvanté
Pour fuir ses tourments, qui ne cessent de le hanter
Décide de descendre dans la plaine, sous le ciel argenté

Le vent s’est levé, déplaçant les nuages
Sous la lune parfois masquée, lui servant d’éclairage
Le troll vers la civilisation descend, lui qui n’a pas d’âge
Guidé par sa bonté, et son instinct sauvage

Animaux domestiques et sauvages, se trouvant sur son passage
Saluent sa venue, comme un heureux présage
Parades ou offrandes en tout genre, pour lui rendre hommage
Toile d’araignée brillante, montrer son beau plumage

Forêts, rochers, sol moussu sont déjà loin derrière
Les habitations ne sont plus très loin, il s’approche de la première
Pas grand mouvement à l’horizon, ça dort dans les chaumières
Juste quelques fenêtres éclairées, et les lampadaires, petits points de lumière

Soleil, abeilles, fleurs de toutes les couleurs
Blé, Maïs, cultures aux bonnes odeurs
Campagne faite de douceurs
C’était il y’a à peine quelques heures

Villages et villes non loin, plongés dans la torpeur
N’imaginent pas qu’en ce moment, les observe l’horreur
La Dame au visage noir, celui de la fureur
Venue semer la peur, voir pire, la terreur

Même la chouette a eu peur de la Dame Noire, et a filé à tire d’ailes
Cette Dame maléfique, malfaisante, ne sait pas que derrière elle
Le troll guette, et que ces yeux ruissellent
Lui qui déteste le Mal, fera tout pour contrer cette peste qui ensorcelle

Il comprend maintenant son ressenti
Là-haut, sous son rocher, il l’avait senti
Les mauvaises ondes sont de sortie, le positif presque anéanti
L’explication de ses tourments, la violence, tant d’années qu’il est anti

Il sait dorénavant que l’Amour coule dans ces veines, comme l’eau dans le lit de la rivière
Il connaît sa principale force, celle de ses prières
Il a enfin compris que sa mission est de détruire la folie meurtrière
D’anéantir le Mal, et la haine réduire en poussière

Si elle pouvait parler, les propos de la Dame Noire ne seraient que cynisme
Le troll ne la supporte pas, lui qui fait preuve de tant d’altruisme
Tout d’un coup, en lui se passe un véritable séisme
Boulversé, il décide de commettre un acte de vandalisme

Avec prudence, il parvient à contourner la monstrueuse destructrice
Il faut dire qu’il a plus d’un tour dans son sac, c’est un petit être rempli de malice
Le voici dans l’enceinte d’une école, prêt à contrer le maléfice
Et soudain, dans le ciel éclate un feu d’artifice

Après s’être faufilé entre les habitations, avoir enjambé les clôtures
Le troll s’approche d’un muret en béton tout frais, un signe de bon augure
De ces doigts crochus, il inflige à l’ouvrage d’atroces blessures
Des griffures profondes, en guise de gravures

Sur la face horizontale du muret, avec lenteur
De ses griffes, il inscrit dans le béton trois petits cœurs
En espérant ne pas vexer les pauvres bâtisseurs
En espérant qu’ils ne gardent pas en eux de la rancoeur

Trois cœurs gravés dans le béton, pour lutter contre tout ce qui est animosité
Le premier pour l’Amour, et ce qu’il peut susciter
Le second pour la Paix, qu’elle s’installe pour l’éternité
Et le troisième pour que le monde baigne enfin dans la Sérénité

Il est minuit, et le troll prie, les doigts posés sur les cœurs, les griffes encore brillantes
Dans son for intérieur, des paroles bienveillantes
Au-dessus de sa tête, passe une étoile filante
Plus loin, la Dame Noire subit l’attaque de l’Amour, comme un couteau qui la plante

Le troll s’est relevé, soulagé par son incivilité
Pour lui, c’est comme un tag protestant contre l’imbécilité
Amour, Paix, Sérénité, ce pour quoi il existe, il ne cessera pas de militer
Laissant les trois cœurs reposer, il saute par dessus le grillage avec agilité

La nuit touche à sa fin, il rejoint sa tanière
Pour aujourd’hui fini, mais ça ne sera pas la dernière
La bêtise est infini, il faut continuer les prières
Pour empêcher le Noir de recouvrir la Lumière

Loïc Otharan
10 Juillet 2022