La punition

La punition

Nous étions arrogants, totalement immatures
Nous nous sentions puissants, orgueilleux de nature
Nous avions tout sans forcer, jamais de courbature
Tout avoir sans donner était notre signature
Jusqu’au jour où l’Univers s’est dit : j’en peux plus, je sature
Il est temps qu’ils comprennent, ces pauvres créatures

Nous étions insouciants, nous manquions d’ambition
Devant nous l’infini, éternels, sans condition
L’amour à volonté, tout à notre disposition
Nous n’avons pas su changer, aucune évolution
L’Univers a dit : c’est fini, maintenant, vous paierez l’addition
Je vous place dans une vie, où le temps imposera sa loi, c’est votre punition

Nous étions bien trop jeunes pour connaître la sagesse
La facilité nous faisait baigner dans la paresse
Alors, l’Univers a encore fait des prouesses
Il nous a placé dans des corps, il a créer notre espèce
Il a inventé le temps, qui passe à toute vitesse
Nous devenions des enfants, apeurés par la vieillesse

Nous étions jeunes et déjà sans âge
On nous a fait renaître, nouvel apprentissage
Effacés de nos mémoires, les anciens paysages
L’entrée dans cette vie, chemin à suivre, sans balisage
Et ce compte à rebours, nous martelant que nous ne sommes que de passage
Voir nos corps vieillissants, les marques sur nos visages

Nous, désormais dans cette peau d’humain, petits êtres misérables
Nouveau départ sans souvenir, focalisés sur l’inévitable
Notre fin sans suite, décomptant les années qui passent, impitoyables
Démunis, face aux heures qui s’écoulent de façon invariable
Le temps qui passe, sans pitié ni état d’âme, imperturbable
Nous oblige à changer, à devenir raisonnables

Notre vie d’humain a une durée limitée
Une fois achevée, nous pourrions reprendre la routine d’autrefois, notre premier fonctionnement, l’imiter
C’est pourquoi dans notre vie d’humain, surgissent tant de calamités
C’est pourquoi notre bonheur peut n’importe quand être dynamité
C’est pourquoi nous pouvons disparaître à tout moment, que personne n’a d’immunité
De quoi nous faire changer, nous permettre d’évoluer pour l’éternité

Une date d’entrée, une date buttoir, il nous suffirait de compter, c’est mathématique
Ne pas connaître l’issue, ne pas pouvoir faire confiance à des pronostics
C’est dans le but de nous apprendre à vivre au présent, sans regarder les statistiques
Être capable d’apprécier le moment présent a des vertus thérapeutiques
Ceux qui regardent trop le futur sont anxieux, c’est dans le diagnostic
Par manque de prise conscience, certains vont même jusqu’à fermer boutique

La météo s’appelle aussi le temps, car ni l’un ni l’autre ne se contrôlent
Idem pour nos vies, même si beaucoup jouent un rôle
Nous aurons beau chanter sous la pluie de très belles paroles
Nous pourrons faire les malins au soleil, en nous la jouant petits drôles
Nous aurons beau tout posséder, être les rois du pétrole
La Grande Ourse reviendra chaque nuit, pour nous rappeler qu’à tout moment, nous pouvons passer à la casserole

C’est terrifiant de se dire que nous ne serons plus après notre dernier râle
Cela pourrait nous conduire à devenir des êtres sans morale
C’est pourquoi nous apparaissent quelquefois des signes d’une vie ancestrale
Ceux qui savent les voir comprennent que leur vie actuelle est comme une sentence en milieu carcéral
Qu’il n’est pas impossible qu’un jour, leur existence se passe dans l’intersidéral
Se dire que notre existence est éternelle permet de vouloir évoluer, de garder le moral

L’Univers ne nous a pas juste imposé le temps pour nous punir
Il a aussi fait en sorte que nous souhaitions nous réunir
En famille, entre amis, il nous a rendu dépendants de ses gens qui viennent nous nourrir
De leur amour, de leur amitié, qui nous permettent de grandir
Et qui un jour se voient rappelés, qui s’en vont pour toujours, souvent sans prévenir
De quoi nous faire comprendre que rien n’est dû ni acquis, qu’apprécier l’amour des autres, c’est agrandir son cœur, son âme l’éblouir

Une date de naissance, puis les anniversaires
D’abord on en re-veut, dès qu’on peut, on se ressert
Un an de plus vers l’âge adulte, c’est comme un bon dessert
Mais au bout d’un moment, le temps devient notre adversaire
On veut changer de montre, on va voir le faussaire
Les dates deviennent cruelles, et puis nos cœurs se serrent

Nous naissons généralement dans l’amour, entourés de nos parents
Mais un jour ils s’en vont, le ciel nous les reprend
Nous sommes des enfants qui sont devenus grands
Nous sommes tous pareil, même si tous différents
Nous ne comprenons qu’il est trop tard qu’en pleurant
C’est malheureusement comme ça qu’on apprend

Le temps qui passe, l’approche de l’heure fatidique
Les dates, anniversaires d’évènements tragiques
Autant de rappels qui nous plongent dans la tristesse, qui nous rendent nostalgique
Mais n’oublions pas que dans chaque partition de musique
Ce sont toujours les mêmes notes, juste placées différemment, seul le morceau est unique
Si la partition de notre vie s’arrête, les notes continuent d’exister, de vibrer, c’est tout simplement logique

Loïc Otharan
27 Septembre 2022