La hache de guerre

La hache de guerre

42 ans tout frais, me voilà dans une période inédite
Émotionnellement malmené, montagnes russes maudites
Changements intérieurs, mon compte en doute se crédite
Ces tâches du quotidien devenues insupportables, réjection interdite
De nouvelles certitudes déjà contredites
Moi qui pensais en avoir terminé avec cet audit
Tout est remis en question, l’impression que la messe a été dite
D’où vient ce chamboulement, qui donc le commandite

Je vous disais récemment que désormais j’avais confiance en moi, assez pour ne plus douter
C’était sans compter sur ces ressentis inexpliqués, venus en moi tout flouter
Ce bouillonnement interne, multiples contrastes faits pour me dérouter
Tantôt excité, tantôt épuisé, tantôt agacé, tantôt déprimé, tantôt motivé, tantôt dégoûté
Une grande difficulté à savourer l’instant, parfois incapable d’y goûter
L’impression d’être écrasé, de sentir mon corps se voûter
De mon front, le jus de ma frustration est en train de goutter
J’ai du mal à comprendre, ce n’est pourtant pas faute d’essayer d’écouter

Des envies de changement de plus en plus pressantes
La cadence de mon quotidien devenue oppressante
Un moral en dent de scie, ces jours-ci en descente
Ces tiraillements intérieurs, ces piqûres blessantes
Et pourtant tout va bien, mes plaintes sont indescentes
J’en ai vraiment conscience, ma culpabilité en devient rabaissante
J’ai tout pour être heureux, mon âme devrait juste être reconnaissante
Non pas se sentir vulnérable, sa sérénité évanescente

Lundi dernier, tandis que je monte sur le Baigura, vers le sommet enveloppé de brume
Que je tente d’évacuer ce stress inexplicable, qui depuis quelques temps me consume
Marchant sur le sentier caillouteux, en ce 1er Mai que la flore parfume
Mon regard est attiré par quelque chose, aussitôt mon cerveau fume
J’interprète ceci comme un signe, mon envie d’écrire se rallume
Non, il ne s’agit pas d’un ange venu déposer une plume
Mais d’un tomahawk, une hache de guerre que la terre exume
J’en déduis que la guerre est une fois de plus en moi, serait-ce une coutume

Ce tomahawk n’est en fait qu’un bout de bois contre une pierre
Mais la ressemblance est frappante, inutile d’être un spécialiste en la matière
Il s’est jeté sur mes yeux, me soulevant les paupières
M’obligeant ainsi à m’élever pour franchir la frontière
Celle qui nous sépare de l’invisible, de l’extraordinaire
Qu’on ne voit ni ne touche, qui n’a pas de matière
Que bon nombre d’humains rejettent, théorie selon eux bonne pour la pissotière
Que beaucoup ne voient pas, coincés dans leurs œillères

Ma véritable personnalité sort doucement de sa coquille
Quand j’écoute mes envies, j’en ai les yeux qui scintillent
Les idées de projets sonnent à la porte de mon coeur et le titillent
Je veux tout faire et être partout à la fois, mon énergie je gaspille
Je suis frustré, je veux créer et me sens bridé, mon esprit me houspille
Mes enfants me manquent, leurs étreintes pleines d’amour, mes attentes se maquillent
Pour mon plus grand bonheur, une belle dame m’épaule, compréhensive et gentille
Ma douce qui choisit de combattre, plutôt que de se laisser partir en vrille

J’ai un gros défaut, celui de vouloir tout contrôler
Je n’aime pas subir, je préfère m’envoler
De cet état d’esprit, où je me suis auto-enrôlé
Je vais devoir m’extraire, si je veux décoller
Je viens d’en prendre conscience, après m’être isolé
Ce ne sera pas facile, j’en suis bien désolé
Ça sera difficile, mes habitudes sur moi sont collées
Mais j’y arriverai, je ne dois pas m’affoler

Au final, pourquoi toujours chercher une explication
Peut-être que notre fatigue, nos problèmes de concentration
Nos sautes d’humeurs, nos trop pleins d’émotions
Ne viennent pas de nous, ni de notre alimentation
Peut-être que certaines de nos différentes sensations
Ne sont que le résultat de changement de vibration
Que notre inconscient n’en peux plus de toutes ces anciennes obligations
Peut-être suffit-il d’accepter les variations, en attendant la décantation

Loïc Otharan
03 Mai 2023